Le Bisphénol A (BPA) est principalement utilisé dans la fabrication industrielle de polymères tels que les plastiques polycarbonates et les résines époxy. Ces matériaux sont utilisés dans une large gamme de produits courants, y compris les emballages alimentaires.
Par exemple, les polycarbonates sont utilisés dans les bouteilles en plastique réutilisables, les biberons et les contenants de stockage. Les résines époxy sont utilisées pour recouvrir les boîtes de conserve d’aliments et de boissons, ainsi que pour recouvrir l’intérieur des tuyaux utilisés pour fournir de l’eau potable.
De plus, le BPA est utilisé dans une large gamme d’autres produits. Ceux-ci incluent le papier thermique, les encres, les textiles, les peintures et les adhésifs, les équipements électroniques, les matériaux de construction tels que les revêtements de sol, les jouets, les CD, les revêtements de carrosserie, les dispositifs médicaux et les matériaux d’obturation dentaires (résines composites) [1].
La principale cause d’exposition au Bisphénol A est la nourriture en conserve en raison de la contamination par la couche protectrice interne, suivie par le contact avec le papier thermique (tickets de caisse p. ex.) [3].
Le monomère bisphénol A glycidyl diméthacrylate (Bis-GMA) est le dérivé du BPA le plus couramment utilisé dans les composites dentaires pour le traitement des caries. Il peut être hydrolysé par des enzymes salivaires – en faible quantité – en BPA [2].
Un autre dérivé du Bisphénol A utilisé dans les matériaux dentaires est le diméthacrylate de bisphénol A (Bis-DMA). Il peut s’hydrolyser en Bisphénol A grâce à une estérase salivaire [4].
Les études scientifiques disponibles ne sont pas unanimes. En effet, les matériaux dentaires examinés sont souvent différents par leur composition en monomères (Bis-GMA, Bis-DMA, Bis-EMA, UDMA, HEMA, etc…). De plus, les modifications chimiques dans la salive sont difficiles à reproduire in vitro.
Néanmoins, certains résultats peuvent interpeller. Une étude portant sur environ 500 enfants dont une partie avaient reçu des traitements par résines composites contenant du Bis-GMA et une autre partie ont été traités avec des matériaux différents, a abouti à cette conclusion inquiétante:
« Une plus grande exposition aux restaurations dentaires en composites à base de Bis-GMA était associée à une altération de la fonction psychosociale chez les enfants, alors qu’aucun résultat psychosocial indésirable n’a été observé avec des traitement à base de compomère ou d’amalgame à base de diméthacrylate d’uréthane » [5].
Les études in vivo révèlent le plus souvent un relargage de Bisphénol A, en quantité variable [6].
Mais la limite dangereuse est difficile à définir car il faut tenir compte de « l’effet cocktail » avec les autres perturbateurs endocriniens présents dans l’environnement.
Par précaution, et en accord avec les auteurs suivants [7], nous recommandons:
- La composition de la résine utilisée doit être prise en compte car certains monomères ont des effets plus œstrogéniques que d’autres.
- Le démontage des anciennes restaurations ou la réalisation de nouvelles doivent être réalisés, si possible, avec la protection d’une digue en caoutchouc pour minimiser le risque de dissolution de monomères dans la salive.
- Pour éliminer la dernière couche de résine non polymérisée par suite de contact avec l’oxygène, il faut placer avant la polymérisation une barrière de gel de glycérine ou polir finement la surface.
- Le patient doit faire un bain de bouche 30 s après le traitement afin d’éliminer au mieux les derniers résidus de monomères libres.
- Une attention particulière doit être accordée aux traitements chez les enfants, les adolescents et les femmes enceintes. Pour ces patients, toutes les précautions cliniques suggérées doivent être prises simultanément. Pour les femmes enceintes, le report du traitement doit être une considération clinique, notamment au cours du premier trimestre de la grossesse.
- Eviter les composites multiples durant la même séance de soin.
J’ajoute pour ma part les éléments suivants:
- Evaluer la possibilité d’utiliser des matériaux alternatifs (p. ex. céramique).
- Favoriser la prévention par l’instruction et la motivation aux mesures d’hygiène classiques: brossage, nettoyage interdentaire et utilisation de produits fluorés afin minimiser les besoins de traitements.
1. https://www.eea.europa.eu/publications/peoples-exposure-to-bisphenol-a/
3. https://www.efsa.europa.eu/en/efsajournal/pub/6857
4. Soderholm K.J., Mariotti A. BIS-GMA-based resins in dentistry: are they safe? J. Am. Dent. Assoc. 1999;130:201–209.
7. Paula AB, Toste D, Marinho A, Amaro I, Marto CM, Coelho A, et al. Once resin composites and dental sealants release Bisphenol-A, how might this affect our clinical management? a systematic review. Int J Environ Res Public Health. 2019;16(9):1627.